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Jarmilka

De Bohumil HRABAL

Traduit par Benoit Meunier
Avec la collaboration de J.G. Páleníček

Editions l'Esprit des Péninsules, 2004

Introduction : Le destin de Jarmilka se confond avec l'histoire de la Tchécoslovaquie dans la seconde moitié du XXe siècle. Rédigé durant l'hiver 1951-1952, tandis que le régime instauré en 1948 par Klement Gottwald procède à de nombreuses arrestations et exerce une forte censure envers les écrivains, le texte ne sera publié dans sa version originale qu'en 1992, soit à peine quelques années avant la mort de Hrabal. Entre ces deux dates, celle de la rédaction et celle de la publication, Hrabal tente à deux reprises de faire publier son texte, en 1959 et en 1969. Mais ces éditions, pour lesquelles il est amené à revoir largement son texte, sont retirées de la vente.
Si le texte de Jarmilka a rencontré tant de difficultés pour être publié, c'est que, plus que toute autre œuvre ultérieure de Hrabal, il contient des descriptions explicites du fonctionnement politique du régime communiste. Les malheurs d'une jeune ouvrière enceinte, que son amant ne veut pas épouser, alternent avec une évocation directe des conditions de vie dans les camps staliniens et nazis. Ces deux thématiques, si bien enchevêtrées qu'il devient impossible de dégager du texte une structure de roman classique, se trouvent néanmoins sous-tendues par un troisième motif, celui du quotidien d'un ouvrier employé aux aciéries de Kladno — c'est-à-dire par une expérience autobiographique, puisque Hrabal lui-même y travailla entre 1949 et 1952.

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Mais l'intérêt de Jarmilka ne se limite pas à celui d'un rappel des difficultés à publier sous un régime totalitaire. Il tient également à la place qu'occupe ce texte dans l'œuvre de Hrabal : après l'échec de ses tentatives poétiques des années trente et quarante, il marque un tournant définitif dans son orientation littéraire, le conduisant vers une prose vivante et imagée qu'il ne quittera jamais. Il s’agit de l’une des premières grandes proses de Hrabal, dont l’influence parcourt toute son œuvre. Il ne s'agit pas encore d'un roman, mais d'un « document », dont l'esthétique s'inscrit dans celle du « réalisme total » — une idée chère au grand ami de l’auteur, Egon Bondy.
Hrabal arrache littéralement au réel des fragments qu'il retranscrit directement, notamment des discours d'ouvriers côtoyés chaque jour aux aciéries de Kladno. D'où le ton parfois vulgaire ou comique des répliques, qu'il est difficile de rendre en français. Cette technique relève du « collage », mais, à la différence d'autres textes contemporains de Hrabal, le récit dans lequel il se fond permet une certaine fluidité. Pourtant, le « réalisme total » visé dans ce texte n'est jamais vraiment atteint — les images surprenantes et naïves de Hrabal prennent souvent le dessus et on perçoit ça et là des traces de lyrisme, notamment dans le dernier chapitre, qui renvoient aux longs poèmes de la même période. En outre, le texte n’est pas sans rappeler les romans existentialistes français, dont Hrabal revendique d'ailleurs l'influence, et il ne présente pas de structure dramatique claire, constituant plutôt un « journal de l'expérience ».
A ces aspects du texte s'ajoutent ses implications dans le contexte littéraire de l'époque. Hrabal dresse un tableau des « gens simples » qui fait contrepoids à la littérature officielle d'alors. Son symbolisme (l’enfant à naître pour Noël) renvoie en outre par endroits à la religion chrétienne et contrarie la rhétorique stalinienne. Le texte lui-même est rédigé rapidement, durant le temps libre de Hrabal, à l'aide de sa première machine à écrire, d’où une présentation typographique particulière puisque cette « machine atomique » ne permet pas l'utilisation des signes diacritiques propres au tchèque ; elle le pousse, ainsi que les conseils
d'Egon Bondy, à faire du texte lui-même une sorte « d'objet graphique », qui s'étale sur la page sans aucun alinéa. Les guillemets et autres marqueurs du discours sont absents, ce qui amplifie l’impression de texte monolithique, dans lequel tous les points de vue, tous les discours se mélangent. Cette particularité du texte disparaîtra des différentes versions publiées avant celle de 1992, les éditeurs la considérant comme une entrave à la lecture. Nous avons
choisi de respecter la typographie originale du texte, telle qu'on la trouve dans le tapuscrit et les Œuvres complètes de Hrabal.

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Les deux textes qui encadrent ici Jarmilka – La machine atomique Perkeo et Interview sur le Barrage de l'Eternité — nous ont semblé devoir l'accompagner dans la mesure où ils illustrent bien la vie que menait l'auteur dans les années cinquante, et la façon dont il travaillait. Ils renvoient plus ou moins directement à Jarmilka, et nous laissons Hrabal raconter lui-même la genèse du texte.

Benoit Meunier

 

Table des matières

Introduction : A propos de jarmilka page 7
Jarmilka page 11
La machine atomique Perkeo page 85
Entretien sur le Barrage de l'Eternité page 97

 

 

 

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