Richard Weiner
1884, Písek - 1937, Prague
Richard Weiner nait le 06/11/1884, dans une
famille de commerçants juifs, à Písek,
en Bohême. Il est l'aîné d'une famille de
cinq enfants (deux soeurs et deux frères). Il fait des
études secondaires puis obtient en 1906 un diplôme
d'ingénieur chimiste dans sa ville natale. Il effectue
ensuite un service militaire d'un an, puis travaille quelques
temps dans une distillerie à Pardubice, dans un laboratoire
à Freising (Bavière) et enfin, de 1909 à
1912, dans une usine à malt, à Allach, près
de Munich.
Weiner s'intéresse assez tôt à la littérature,
ainsi qu'à la musique et au théâtre ; il
commence à rédiger des poèmes et des nouvelles
dès ses années d'études secondaires, dont
certains, ainsi que des articles, seront publiés dans
des journaux locaux. Il s'intéresse également
à cette époque à la judaïté,
et prend position contre le sionisme naissant.
Après deux ans d'un travail qui ne
le satisfait pas, Weiner change radicalement de vie, en partant
pour Paris, où il tente de s'établir comme homme
de lettre. Il rencontre cependant des difficultés financières
qui l'obligent à chercher un moyen de vivre de la création
littéraire.
Mobilisé une première fois à la frontière
serbe durant l'hiver 1912, il revient vivre à Paris,
où il publie deux recueils de poèmes, Pták
(L'Oiseau, 1913) et Usměvavé Odříkání
(Une souriante ascèse, 1914), ainsi que quelques
proses dans des revues. En 1914, il revient en Bohême,
mais il est très vite mobilisé une seconde fois
sur le front serbe, où il prend cette fois part à
des combats, et y connait une crise nerveuse en janvier 1915.
Après quelques mois de convalescence,
il reprend ses activités littéraires, et publie
en 1916 le recueil de nouvelles Lítice (Fureurs),
qui témoigne de son expérience de la guerre. Il
travaille alors comme journaliste aux Lidové Noviny,
puis au journal Venkov, en 1917, puis aux Národní
Listy pour enfin travailler de nouveau aux Lidové Noviny,
pour lesquelles il travaillera jusqu'à la fin de sa vie.
En 1917, il publie un second recueil de nouvelles écrites
avant la guerre, entre 1911 et 1914 : Netečný
Divák a jiné prozy (Le Spectateur indifférent)
; puis les poèmes de Rozcestí (La
croisée des chemins) en 1918 et enfin le recueil
de nouvelles Škleb (La Grimace) en 1919.
En janvier 1919, Weiner retourne à Paris,
où il travaillera comme correspondant des Lidové
Noviny jusqu'en 1935. Cette dernière période sera
l'occasion d'une vie toute différente de ses premiers
séjours à Paris : il se lie avec les membres du
groupe Le Grand jeu (René Daumal, Roger Gilbert-Lecomte,
Šíma...) et peut enfin subvenir à ses besoins.
Il rédige de très nombreux articles, prenant pour
sujet aussi bien l'actualité française que la
mode, les habitudes, l'art, etc. Il publie également
plusieurs ouvrages : Mnoho noci (De nombreuses
nuits, 1928) ; Zátiší s kulichem,
herbářem a kostkami (Nature morte avec
chouette, herbier et dés, 1929) ; Lazebník
(Le Barbier, 1929) ; Mezopotamie (Mésopotamie,
1930) et enfin Hra doopravdy (Jeu pour de vrai,
1933). Weiner retourne dans la Tchécoslovaquie d'alors
en 1935, et meurt à Prague en 1937.
Les textes de Weiner se rattachent au style
expressioniste, en quoi on peut le rapprocher, pour la période
d'avant-guerre, d'écrivains comme Jakub Deml ou Ladisláv
Klíma ; les types psychologiques qu'il dépeint
et sa décomposition de la réalité l'inscrivent
définitivement dans cette esthétique. Cependant,
sa façon de traiter certains thèmes récurrents
(le suicide, le double, la faute, l'homme de trop...) et plutôt
sombres prépare, dans une certaine mesure, l'écriture
existentialiste. A la recherche d'une vie meilleure, d'un salut,
Weiner se situe toujours dans l'entre-deux.
Benoit Meunier
Adapté de Jarmila Mourková, "Expresionistické
prozy Richarda Weinera",
in Richard Weiner, Spisy, tome I, Prague, Torst, 1996,
pp. 453-471 ;
ainsi que de Marie Langerová, Weiner, Brno,
Host, 2000
et Viktor Šlajcht, "Weiner píše z Paříže",
in Respekt No 23, 10-16/03/2003.