Jakub Deml
(1878-1961)
Né le 20 août 1878 à Tasov.
En 1896, il rend visite au poète Otokar Březina
sur lequel il laissera plus tard un témoignage capital.
Ce dernier lui conseille de devenir prêtre. Il entre au
séminaire de Brno, se rapproche du mouvement des Poètes
modernes catholiques (Katolická moderna) et publie ses
premiers poèmes dans les revues Muzeum et Nový
ivot. En 1902, Deml est consacré prêtre.
Il commence à fréquenter le sculpteur František
Bílek et à collaborer avec l’éditeur
morave Josef Florian (il dirige pour lui la collection STUDIUM).
En 1906, il fait connaissance de Jaroslav Durych, alors étudiant
en médecine. En fréquents conflits avec sa hiérarchie,
il est suspendu de ses fonctions en 1907 et se consacre alors
pleinement aux traductions de textes religieux latins et allemands
et à la littérature, « écrivant
avec une liberté de ton et une ferveur qui mettent à
nu l’inquiétude d’une quête sans espoir ».
(Erika Abrams). Il rencontre le graveur et peintre Josef Váchal
qui illustrera plusieurs de ses livres. Dans un grand dénuement,
ses œuvres ne peuvent être publiées que grâce
à l’aide de mécènes, à compte
d’auteur. C’est le cas notamment de Traces de
pas [Šlépeje], une série de
vingt-six cahiers parus entre 1917 et 1941, qu’il qualifie
de « journal intime », puis de « revue »
et qui présentent un enchevêtrement de notations
intimes, d’extraits de correspondance, de coupures de
presse, de poèmes et de pièces en proses tant
lyriques que polémiques qui rappellent souvent la véhémence
et la virulence du Journal de Léon Bloy. En 1945, l’armée
allemande occupe Tasov à cause des activités des
partisans et choisit des otages qu’elle s’apprête
à fusiller : Deml demande à prendre la place
des otages et à être fusillé à leur
place si les vrais coupables ne sont pas découverts.
Heureusement, c’est alors que l’armée russe
intervient. Après la guerre, Deml est critiqué
dans la presse et traité de collaborateur à cause
de certains passages de Traces de pas [Šlépeje].
Ses amis et notamment le poète Vítezslav Nezval,
interviennent pour empêcher le procès qui se prépare
contre lui. Après la prise de pouvoir par les communistes,
les petites maison d’édition sont fermées
de force et il est interdit de publier à compte d’auteur.
Nezval se rend à Tasov pour proposer à Deml une
rente de la part du ministre Kopecký. Deml refuse. Désormais,
ses oeuvres ne circuleront que de façon clandestine sous
forme de manuscrits et de correspondances. Alors qu’à
Prague, de nombreux procès sont menés contre écrivains
catholiques, prêtres et laïques, il se rend au camp
de travail pour religieux de Moravec sur lequel il apportera
un témoignage dans Songe d’automne [Podzimní
sen] (qui ne paraîtra qu’en 19921). Il meurt
le 10 février 1961, dans le plus grand secret, mais considéré
comme un des plus grands poètes tchèques par toute
une génération de personnalités tchèques
(notamment par les auteurs de la future revue Tvář).
J. G. Páleníček
d’après Jiří Olič, Lecture
sur Jakub Deml [Čtení o Jakubu Demlovi],
Votobia, 1993.