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Jan Čep
(1902-1974)
Jan Čep (Cep) est né à l’aube
du nouvel an comme du nouveau siècle, le 31 décembre
1902, à Myslechovice, près de Litovle, un petit village
au centre de la Moravie. Le milieu propice de la campagne, le spectacle
du cycle naturel de la vie et de la mort ainsi qu’une éducation
catholique devaient fortement influencer son regard et ses futures
œuvres.
Après quelques années d’études à
la faculté de lettres de l’Université Charles
de Prague, Jan Čep décide de contacter Josef Florian,
un éditeur morave au talent extraordinaire dans ses choix
de publication, et dont la maison d’édition, relativement
petite, étaient cependant très importante dans les
sphères culturelles. Entre 1926 et 1927, Čep rejoint
Florian à Stará Ríše, en Moravie, pour
y effectuer les traductions de plusieurs ouvrages en anglais et
en français qui devaient s’avérer par la suite
importants. Parmi les nombreux auteurs entrés dans la littérature
tchèque grâce aux talentueuses traductions de Čep,
citons son ami Henri Pourrat avec le roman Gaspard des montagnes,
G. Bernanos (qu’il rencontra à plusieurs reprises)
ou Ch. F. Ramuz.
La première œuvre de Jan Čep, Dvojí domov
(Double domicile), parait en 1926, et ouvre une lignée de
recueils de nouvelles et de récits centrés sur les
évènements tragiques de la vie des hommes, l’inquiétude
et le désir du chemin vers Dieu, la solitude de l’être
qui entrevoit, à côté de sa place sur terre,
un autre lieu, enfin la question de la mort de l’angoisse,
qui ne cessent d’accompagner les pas de l’homme. Ce
sont Zemeluc (La centaurée, 1931) Letnice (La Pentecôte,
1932), Deravý plášt (Le manteau troué,
1934), Modrá a zlatá (Bleu et or, 1938).
Un seul roman de Čep, Hranice stínu (La frontière
de l’ombre, 1935), traite du thème du retour aux origines,
avec la recherche de racines dans une certaine région, dans
la nature de ses paysages typiques aussi bien que dans la dimension
culturelle et religieuse constituée par les traditions de
ses habitants, qui sentent toujours la présence de leurs
morts peser sur leur destin.
Durant la deuxième guerre mondiale, Jan Čep se retire
à Myslechovice, tout en continuant son travail littéraire
et sans perdre contact avec ses amis, écrivains catholiques
tchèques pour la plupart.
Après 1948 et la prise de pouvoir par les communistes, le
régime programme la liquidation de la religion dans toute
la Tchécoslovaquie, et Čep, qui sent alors peser sur
lui la menace d’être emprisonné, quitte illégalement
le pays pour s’installer en France, pays qu’il avait
déjà visité et dont il aimait la culture.
Malgré de nombreux essais rédigés pour la radio
Europe Libre (certains furent publiés sous les titres Rozptýlené
paprsky (Rayons dispersés, 1946) et Události a lidé
(Des évènements et des hommes, 1991), Čep ne
parvient pas à trouver son public en France, et ne publie
qu’un seul livre rédigé en français,
Ma soeur l´angoisse, qui rassemble des fragments autobiographiques.
Ce recueil de souvenirs clôt une œuvre en prose exceptionnellement
riche, au style presque magique, et qui met à profit la grande
richesse de la langue tchèque pour dresser de véritables
« peintures » verbales de la campagne, avec toute ses
couleurs, ses odeurs, les caractères de ses habitants et
leurs problèmes existentiels.
En 1954, et ce malgré le considérable travail d’essayiste
qu’il effectue alors, Čep se marie à Paris avec
Primerose, fille de l’écrivain français Le Bos.
Ils auront en janvier 1955 des jumeaux, Jean et Claire.
La fin de la vie de Jan Čep est marquée par une attaque
d’apoplexie qui le paralyse, l’empêchant ainsi
d’écrire. Il meurt le 25 janvier 1974 à Paris
sans avoir jamais revu sa Moravie natale, et est enterré
au cimetière de La Celle Saint Cloud, près de Paris.
La littérature tchèque ne devait le reconnaître
qu’après la chute du communisme, en 1989.
Milada Záborcová
Sources :
Med, J. : Spisovatelé ve stínu. Prague,
Portál, 2004.
Rotrekl, Z. : Skrytá tvář české literatury.
Brno, Blok, 1993.
Trávnícek, M. : Pout a vyhnanství.
Brno, Proglas, 1996.
Trávnícek, M. : Sdílet věcné. Studie,
profily a kritiky. Olomouc, Periplum, 2002.
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